Urgence renard [PV : Esteban]

L’air frais du matin était idéal pour une promenade dans le parc de Poudlard. Sorcière et familier déambulaient, peinards, d’abord près du lac noir puis ensuite à l’orée de la forêt interdite. Parfois, la renarde arctique s’éloignait dans le boisé pendant que sa maîtresse étudiait les arbres dans l’espoir de repérer des Botrucs, qui étaient un gage de la qualité du bois pour la fabrication de baguettes.

L’étudiante était d’ailleurs sur le point de déterminer si la chance lui souriait ou pas lorsqu’elle entendit un couinement anormal. Elle se retourna aussitôt dans la direction d’où provenait le bruit. Notant l’absence de son animal de compagnie, elle sentit la crainte la prendre au ventre. « Catja!? » appela-t-elle tout en s’approchant de la forêt.  « Catja! Où es-tu? » Elle espérait voir sa boule de poils adorée surgir en pétant la forme.

Quand ce ne fut pas le cas, Rosalind n’hésita pas une seconde à pénétrer dans le lieu interdit afin de voler au secours de sa renarde. Tout à coup, elle entendit le rugissement typique d’une vieille voiture. Elle haleta : ça devait être la Ford Anglia sauvage! Des rumeurs concernant le véhicule enchanté s’étaient rendues jusqu’à ses oreilles, mais elle ne l’avait jamais croisée… État de fait qui n’était pas dû pour changer, car elle aperçut alors une tache blanche sur le sol de la forêt et le reste du monde disparut à ses yeux.

- Catja!

La Danoise se rua aux côtés de son animal, qu’elle prit délicatement dans ses bras. La pauvre bête émit quelques gémissements, mais n’opposa aucune résistance. Un rapide examen visuel confirma qu’elle s’était vraisemblablement fracturé une patte et possiblement autre chose quand la voiture sauvage l’avait happée.

- Tiens bon, ma chérie. On va te soigner, il suffit que tu tiennes jusqu’à ce que je trouve du renfort, d’accord?

C’était à se demander qui avait le plus besoin de réconfort entre la sorcière et son familier.

La Serpentard se lança dans une course effrénée jusqu’à la cabane du garde-chasse, qui était malheureusement vide. Elle jura tout bas avant de se remettre en route pour la salle de classe de soins aux créatures magiques. Encore une fois, il n’y avait personne pour lui venir en aide. Désemparée, elle chercha frénétiquement à quel autre endroit où elle pourrait chercher de l’aide. La salle des professeurs, peut-être? Elle détala à nouveau, croisant un autre élève accompagné de son…

- Renard? Elle se retourna pour rejoindre l’universitaire, car ç’en était bien un. Arrabal? Elle espérait fortement ne pas se tromper de nom. Vous étudiez la médecine vétérinaire, pas vrai? demanda-t-elle désespérément. Catja a été happée par une voiture… La Ford Anglia dans la forêt interdite. Je regardais les arbres et ne portais pas attention à Catja. Elle s’est éloignée puis je l’ai entendue crier. Dans sa panique, elle déblatérait tous les détails qui lui passaient par l’esprit. Pouvez-vous l'aider? Je vous en supplie.

Rosalind était peut-être une personne fière, mais pas au point de ne pas implorer l’aide de quelqu’un quand la vie de sa boule de poils était en jeu.

Peu de choses faisaient perdre son sang froid à Rosalind autant que voir sa renarde en si piètre état. Elle adorait cette petite boule de poils. La savoir blessée à cause de son inattention la rongeait de l’intérieur à une vitesse fulgurante. Elle s’en voulait d’avoir baissé sa garde et d’avoir priorisé un arbre plutôt que son animal. Elle était pourtant la première à prévenir les jeunes sorciers de faire doublement attention à l’orée de la Forêt interdite. Si elle avait suivi ses propres conseils, rien de tout ça ne serait arrivé!

- Du quo… Du calme, oui, vous avez raison. La vie de Catja en dépendait. Tenez, fit-elle en lui tendant son familier comme si ce dernier était plus fragile que de la porcelaine. Merci, ajouta-t-elle à toute vitesse, oubliant presque de communiquer sa reconnaissance tant elle était énervée.

La Danoise n’eut pas à se faire demander de s’installer au sol elle aussi, le faisant automatiquement en même temps qu’Arrabal. Elle caressa la tête de son familier tout en lui susurrant des paroles réconfortantes afin qu’elle se tienne tranquille. Pas que Catja était dans le moindre état de s’opposer à l’examen de l’Espagnol… « Je suis désolée, ma chérie, » murmura-t-elle tout bas.

Son coeur se serra davantage en apprenant qu’en plus de sa patte, Catja avait subi des dommages importants aux côtes. Quelle maîtresse irresponsable elle était! L’universitaire prit quelques profondes inspirations. Elle ne pouvait pas se laisser distraire par ses émotions envahissantes, sa concentration devait demeurer sur sa renarde. Elle devait garder espoir que son camarade parviendrait à la guérir suffisamment pour que sa vie ne soit plus en danger. « Shhh, ma belle, c’est bientôt fini. Tiens bon. » Il allait sans dire qu’elle n’oublierait pas les gémissements de son animal de compagnie de sitôt.

La Féroïenne poussa un long soupir lorsque les os finirent de se remettre en place. Le pire était derrière eux. Sa respiration était un peu chevrotante, mais c’était normal vu la montagne russe d’émotions qu’elle venait de vivre. Elle gratta derrière l’oreille du renard noir, trouvant ce dernier mignon de s’occuper ainsi de sa consoeur canidé.

La voix d’Esteban la tira de son court moment d’admiration des deux bêtes ensemble.

- Merci. C’est entièrement grâce à vous. Elle sortit de sa poche un linge qu’elle utilisait normalement pour nettoyer rapidement les pattes de Catja sans avoir recours à la magie, puis le tendit au Sévillan pour qu’il puisse essuyer la sueur de son front. J’ai eu de la chance de tomber sur vous… Et je suis désolée si j’ai paniqué. J’avais trop peur pour réfléchir convenablement. Je vous en dois une.

Le garçon était mieux d’avoir écouté, car Rosalind ne mentionnerait pas son affolement une autre fois. Il y avait des limites à piler sur son égo pour remercier quelqu’un quand même… Surtout pour une Serpentard qui n’était pas fière de ses agissements. De plus, elle lui devait maintenant une faveur. Elle ne nierait jamais ce fait, étant une femme de parole, malgré qu’elle ne ferait pas exprès de le lui rappeler dans l’avenir. C’était à lui de se souvenir qu’elle lui était redevable si jamais il venait à avoir besoin de son aide.

- Comment s’appelle le vôtre? s’enquit-elle en pointant le renard noir du menton. Il me semble bien affectueux. Elle se mit à flatter distraitement sa propre boule de poils. Il pourrait faire un bon ami pour Catja. Il y a trop peu de renards dans cette école, déplora-t-elle en rigolant. Elle a quelques copains à Sørvágur, mais personne avec qui s’amuser à Poudlard… Et disons qu’après les événements d’aujourd’hui, je ne risque pas de m’aventurer dans la Forêt interdite pour lui en trouver.